Quelques rappels sur la versification



« Versification » est un terme générique désignant tous les modes de structuration du poème.
Cette structuration s'opère selon deux axes:
- horizontal (structuration interne): mètre, césure, coupes, récurrences phoniques...
- vertical (structuration externe): rimes, groupements strophiques...

I- STRUCTURATION HORIZONTALE

Le mètre: mesure donnée par le nombre de syllabes prononcées dans le vers (volume du vers)

> Mètres pairs
- Alexandrin: mètre de 12 (redécouvert par la Pléiade qui le préfère au décasyllabe, devient le « grand vers » à partir du XVIle. « Cadence nationale » selon Mallarmé)
- Décasyllabe: mètre de 10
- Octosyllabe: mètre de 8 (le plus ancien de là tradition française)
- Hexasyllabe: mètre de 6

> Mètres impairs

- Hendécasyllabe: mètre de 11

- Ennéasyllabe: mètre de 9

- Pentasyllabe: mètre de 5
Les mètres impairs sont courants dans la littérature médiévale, ils connaissent ensuite une longue éclipse puisqu'ils ne seront redécouverts que par la modernité (cf Verlaine)

NB: le vers français a pour unité de base la syllabe... et non le pied (terme à proscrire).







* La césure: point de partage fixe dans les vers ayant plus de 8 syllabes (on la symbolise ainsi://).



L'accent porte sur la syllabe précédant la césure. La césure est tantôt sentie comme un point d'orgue,

tantôt comme un repos.
- Dans l'alexandrin: 6 // 6 (soit 2 hémistiches de 6 vers) Exception: l'alexandrin trimètre: 4 / 4 / 4 (« Toujours aimer / toujours souffrir / toujours mourir » Suréna. Le trimètre sera très utilisé par les Romantiques) - Dans le décasyllabe: 4 // 6 (on trouve aussi en poésie moderne: 6 // 4 et 5 // 5) - Dans l'ennéasyllabe: soit 4 // 5 soit 3 // 3 / 3. - Dans l'octosyllabe: pas de césure fixe.
* La coupe: séparation variable entre les mesures (à l'intérieur des hémistiches: accents secondaires, ou dans les vers de volume inférieur à 8 syllabes). Exemple:
« Ange plein de gaieté, // connaissez-vous / l'angoisse, (6 4 / 2)
La honte, / les remords, 11 les sanglots, / les ennuis, (3 3 // 3 / 3: tétramètre)
Et les va / gues terreurs // de ces affreu / ses nuits (3 /3//4/2)
Qui compri / ment le coeur // comme un papier / qu'on froisse ? (3 3 4
2)
Ange plein de gaité, // connaissez-vous / l'angoisse ? »


(« Réversibilité », Baudelaire)


La question principale est celle du -e caduque (muet, atone...)

- vers 1: Ange (2 syllabes)

- vers 2: la honte (3 syllabes)

- vers 3: les vagues, affreuses (3 syllabes)

- vers 4: compriment (4 syllabes), comm(e) un (2 syllabes)

Dans le vers:

- le -e chute devant voyelle: élision (vers 4)

- il se prononce devant consone sonne (tous autres exemples)

En fin de vers: il ne compte pas mais se prononce: rimes féminines (ex: angoisse 2 syllabes)



> Types de césures et de coupes:

- Césure ou coupe enjambantes: tombe juste avant le -e compté, en milieu de mot (cas très fréquent: rythme fluide) ex: les va / gues terreurs ex: « A votrefils Di // tes queje suis sienne » 5 //5 (Villon)

- Césure ou coupe lyriques: tombe juste après le -e compté

ex: la honte, // les remords

NB: parfois, la distinction entre « enjambante » et « lyrique » n'est qu'un effet de lecture, qui dépend de la sensibilité du lecteur. (dans le vers de Villon, on pourrait opter pour une coupe lyrique et un vers 4 // 6)

- Césure ou coupe épiques: tombe sur un un -e apocopé bien que non élidable (ne se rencontre qu'en poésie moderne)ex: « Ils cuei / llent les colchiqu (es) // qui sont / comme les mères » (Apollinaire) le - es devrait en toute rigueur compter devant consonne, mais l'on aurait alors un mètre de 13.

Effets phoniques: (structuration par la récurrence des sons) Assonance: répétition de phonèmes vocaliques. « Tout m'afflige et me nuit et conspire à me nuire » (Phèdre) - Allitération: répétition de phonèmes consonnantiques « Pour qui sont ces serpents qui sifflent sur vos têtes » (Andromaque)

Il- STRUCTURATION VERTICALE

Rimes: identité de voyelles finales accentuées et des phonèmes qui la suivent. Cette structuration phonique se double la plupart du temps dune structuration sémantique (il faut toujours interroger les mots placés à la rime).

Qualité de la rime:
Pauvre: 1 phonème (vu / plus = [ü])
Suffisante: 2 phonèmes (envie / vie = [vi])
Riche: 3 phonèmes (glacé / passé = [ase])

- Masculine: sans -e muet final (glacé) - Féminine: avec -e muet final (angoisse) En théorie, une stricte alternance entre masculines et féminines doit être observée.

- Disposition des rimes: Plates ou suivies: aabb Croisées: ababa Embrassées: abba Continues (poème monorime): même rime dans tout le poème.

* Strophe: Unité immédiatement supérieure au vers (groupement de vers). Elle est définie par les rimes, les mètres (en cas d'hétérométrie) et la place éventuelle de la césure strophique.

- Distique: 2 vers

- Tercet: 3

- Quatrain: 4

- Quintil: 5

- Sizain: 6

- Septain: 7

- Huitain: 8 etc...